Rapport de l'organe de médiation

Raymonde Richter, médiatrice RTSR
«Quand tout le monde est du même avis, c’est que personne ne réfléchit beaucoup.»
Walter Lippmann
«Les faits ne pénètrent pas dans le monde où vivent nos croyances.»
Marcel Proust, Du côté de chez Swann
Remerciements
Je remercie tout d’abord Mesdames Eliane Chappuis et Dominique Lienher de la RTSR pour leur agréable et efficace collaboration et pour avoir assuré le lien entre mon activité et celle des autres organes de la RTSR.
Mes remerciements vont également au président du Conseil du public, Monsieur Matthieu Béguelin ainsi qu’à ses membres pour le renouvellement de leur confiance.
J’en profite pour témoigner ma reconnaissance à Mesdames Michèle Steudler et Anaïs Fontaine, respectivement cheffe et collaboratrice du service des Affaires juridiques de la RTS, ainsi qu’à Madame Béatrice Jéquier, adjointe de la Direction Actualité et Sports de la RTS, pour leur implication dans le suivi des cas de médiation et les discussions constructives que nous avons eues.
Je n’oublie pas de saluer la participation active de tous les responsables, producteurs et journalistes de la RTS qui ont été sollicités dans le cadre des processus de médiation, en particulier ceux qui ont accepté de venir discuter autour d’une table lors des séances de médiation.
Enfin, je relève la contribution des auditeurs, téléspectateurs et utilisateurs des autres services journalistiques de la RTS, qui ont pris le temps d’expliquer leur mécontentement et d’émettre leur avis critique envers certaines émissions. Au-delà des particularités de chaque cas, les démarches individuelles du public permettent à la RTS d’avoir un retour constructif sur ses programmes et lui donne quelques pistes pour améliorer la qualité de son service public.
Toutes les personnes citées ont contribué à ce que je puisse mener mon activité de médiatrice dans de bonnes conditions et que le processus devant l’Organe de médiation puisse être un espace de dialogue entre la RTS et son public et permette de limiter les plaintes subséquentes auprès de l’Autorité Indépendante d’Examen des Plaintes (AIEP).
Première partie: gestion courante de l’Organe de médiation
1° Courriels
Depuis la mise en ligne d’un formulaire de contact pour déposer une réclamation devant l’Organe de médiation, la médiatrice reçoit moins de courriels qui n’entrent pas dans son champ de compétence. Il reste néanmoins quelques messages électroniques avec des contenus divers, par exemple des critiques plus larges que les griefs des articles 4 et 5 LRTV, des demandes de contact, des informations sur des événements à couvrir, des problèmes techniques de réception, voire quelques insultes et coups de gueule. Les expéditeurs sont pour la plupart redirigés vers les services compétents.
2° Rencontre entre les médiateurs des Médias Francophones Publics (MFP)
Du 3 au 5 avril 2019, la médiatrice a rencontré à Genève ses homologues français, belge et canadien. Les échanges sur les pratiques respectives ont été riches d’enseignements. La rencontre ayant eu lieu à Genève, les personnes suivantes ont pu participer activement à l’une ou l’autre des sessions permettant de donner une information vivante du fonctionnement de la médiation en Suisse romande : Madame Eliane Chappuis de la RTSR, Mesdames Béatrice Jéquier, Michèle Steudler et Anaïs Fontaine de la RTS, Madame Ilaria Tassini Jung et Monsieur Séphane Werly de l’AIEP. La relation avec les publics a été au cœur des discussions.
3° Auditions de candidats pour le Conseil du public
En date des 7 juin, 24 et 30 septembre, ainsi que le 15 novembre 2019, la médiatrice a auditionné à Neuchâtel et Lausanne avec le Président et un membre élu du Conseil du public des nouveaux candidats pour le Conseil du public.
Seconde partie: traitement des réclamations au sens des art. 91ss LRTV par l’Organe de médiation
Dans ce chapitre, seules les réclamations au sens des art. 91ss LRTV et entrant donc dans le champ de compétence de l’Organe de médiation seront développées et retenues pour les statistiques.
A titre informatif, il convient de mentionner que l’Organe de médiation a reçu en 2019 une réclamation qui a dû être déclarée irrecevable, le réclamant ayant refusé de donner ses coordonnées complètes et de reformuler ses propos sans insultes. Par ailleurs, l’Organe de médiation a prêté son concours pour des échanges autour de deux courriels de téléspectateurs qui concernaient le nucléaire (l’un sur l’élimination des déchets radioactifs et l’autre sur la révision de la Loi sur le CO2).
En 2019, l’Organe de médiation a traité 3 réclamations qui avaient été déposées en 2018 et a reçu 21 nouvelles réclamations, soit 14 de moins qu’en 2018. A fin 2019, il restait 3 réclamations en cours.
A noter qu’un réclamant a déposé trois réclamations et un autre réclamant deux.
La Télévision (RTS 1) a été visée à 10 reprises (52.63 %), la Radio (La Première) à 5 reprises (26.32 %) et les autres services journalistiques (RTS Info) à 4 reprises (21.05 %). Par ailleurs, deux réclamations visaient l’ensemble des programmes, l’une au sujet du retrait des troupes américaines de Syrie et l’autre sur l’accès aux programmes des petits partis lors des élections fédérales.
Les réclamations en lien avec la télévision sont en diminution, alors qu’elles sont en augmentation contre des publications conçues par la rédaction et parues dans les autres services journalistiques de la RTS. Le nombre de réclamations concernant la Radio est stable.
Réclamations concernant la télévision
19h30 |
7 |
Temps présent |
2 |
Infrarouge |
1 |
Réclamations concernant la radio
La Matinale |
4 |
Médialogues |
1 |
Réclamations concernant les autres services journalistiques
Autres réclamations
Sur l’ensemble des programmes |
2 |
Les émissions en lien avec l’actualité sont concernées de façon prépondérante sans toutefois pouvoir établir une tendance sur les sujets visés qui étaient divers et variés.
Concernant les griefs invoqués en 2019, c’est toujours le principe de la présentation fidèle des faits de l’art. 4 al. 2 LRTV, avec ses sous-catégories (libre formation de l’opinion, diligence, véracité et transparence), qui a été invoqué dans la grande majorité des cas, suivi par le principe du reflet de la diversité des événements et des opinions de l’art. 4 al. 4 LRTV. A noter que certaines réclamations faisaient référence à ces deux principes. Le principe du respect des droits fondamentaux de l’art. 4 al. 1 LRTV, avec ses sous-principes (dignité humaine et non-discrimination) a été invoqué deux fois.
L’art. 4 al. 3 LRTV qui dispose que les émissions ne doivent pas nuire à la sûreté intérieure ou extérieure de la Confédération ou des cantons ni à leur ordre constitutionnel ainsi que l’art 5 LRTV protégeant les mineurs n’ont pas été invoqués.
Concernant ces griefs, il a été privilégié de ne pas citer pour chaque cas de médiation décrit ci-dessous la base légale applicable, mais plutôt de résumer en quelques mots les doléances des réclamants, en restant au plus proche des formulations utilisées. L’anonymat des réclamants ainsi que la confidentialité des discussions qui ont eu lieu et des termes de l’accord qui a été trouvé ont été maintenus.
Quant au mode de traitement, sur les 21 nouvelles réclamations de 2019, le processus de médiation a été mené 5 fois au moyen d’une séance de médiation et 16 fois par écrit. Concernant les 3 réclamations datant de 2018 et qui ont été finalisées en 2019, 1 réclamation a été traitée par une séance de médiation et les 2 autres par écrit.
Quand le processus a eu lieu par écrit, le courrier de la RTS ne s’est pas toujours limité à donner des explications ; il pouvait aussi parfois contenir des excuses, la reconnaissance d’un manquement et/ou une rectification. Il en va de même pour les séances de médiation qui ne se sont pas toujours limitées à un échange de points de vue.
Par rapport aux 3 réclamations de 2018, celle qui a été traitée lors d’une séance de médiation n’a pas permis de satisfaire le réclamant qui a poursuivi ses démarches auprès de l’AIEP, laquelle a toutefois rejeté la plainte. Pour les deux processus qui ont eu lieu par écrit, un réclamant a refusé une rencontre en bilatéral proposée par la RTS et a retiré sa réclamation, tandis que l’autre réclamant n’a pas été satisfait par les explications de la RTS mais a renoncé expressément à saisir l’AIEP.
Par rapport aux 16 processus écrits de 2019, 2 étaient toujours en cours de traitement à la fin 2019. Sur les 14 cas qui ont pu être finalisés : 2 réclamants ne se sont plus manifestés suite aux explications de la RTS ; 12 ont exprimé leur insatisfaction suite aux explications de la RTS, mais se sont positionnés de différentes manières : 1 réclamant a retiré sa réclamation, 1 réclamant a refusé de rencontrer la RTS, 5 réclamants ont expressément renoncé à saisir l’AIEP, 5 réclamants se sont réservé le droit d’agir devant l’AIEP, mais seuls 2 l’ont fait.
A noter que toutes les plaintes devant l’AIEP qui étaient mentionnées dans les rapports 2017 et 2018 et qui étaient toujours en cours à fin 2018, ont été rejetées dans le courant 2019.
A préciser encore qu’un réclamant s’est fait représenter et accompagner par un avocat et que sur les 21 nouvelles réclamations, 5 réclamants étaient personnellement concernés par l’émission de la RTS. Pour les séances de médiation, la délégation de la RTS est en principe composée de 3 personnes: un représentant de l’émission visée par la réclamation; un représentant de la direction Actualité et Sports pour une vision transversale et à long terme des programmes ainsi qu’un représentant du service juridique pour les aspects légaux qui pourraient se poser. Le public féminin s’est toujours peu manifesté dans le cadre du processus de médiation mis en place par la LRTV et, en 2019, seules deux réclamations émanaient du public féminin.
1° Réclamations déposées en 2018 et finalisées en 2019 (3)
RTS 1, Mise au point du 14 octobre 2018 (reportage sur le groupe Orllati): pour le réclamant, l’émission postule qu’il existe « une méthode Orllati » consistant notamment à sous-facturer, laquelle permettrait à l’entreprise de faire de gros bénéfices là où ses concurrents sont à la traîne. Par ailleurs, à diverses reprises, le montage de l’émission et les propos qui y sont tenus par divers intervenants manipulent la réalité et donne une image négative de l’entreprise Orllati. Au final, l’émission pêche par une enquête à charge et bâclée présentant des faits faux ou tronqués et ne permettant pas au public de se faire librement son opinion.
Une séance de médiation a eu lieu à Lausanne en date du 12 décembre 2019, mais les parties n’ont pas trouvé d’accord. Le réclamant a saisi l’AIEP qui a rejeté sa réclamation par 6 voix contre 3.
RTS Info, reportage du 7 novembre 2018 (Le procès des «7 de Briançon», un enjeu par-delà des frontières): pour le réclamant, les informations données contreviennent au principe de la diversité des opinions, car le sujet est essentiellement traité selon le point de vue des personnes se retrouvant devant le tribunal correctionnel de Gap, sans que les actions de ces personnes ne soient remises en question. Par ailleurs, le réclamant relève le manque d’impartialité du reportage en raison des questions posées lors de l’interview de Cédric Herrou, questions qui n’abordent pas plus largement les thèmes en lien avec l’arrivée de migrants en Europe, laissant ainsi penser que le journaliste considère que l’action menée par les personnes incriminées est fondamentalement juste.
Le processus de médiation a dans un premier temps eu lieu par écrit. Une rencontre en bilatéral, sans l’intervention de la médiatrice, a été proposée au réclamant. Finalement, le réclamant a décliné l’invitation à échanger en bilatéral avec Laurent Caspary et a retiré sa réclamation.
RTS 1, Temps présent du 29 novembre 2018 («Césarienne, une épidémie contre nature»): dans ce reportage, différentes données statistiques sont citées, portant sur la proportion d’accouchement par voie basse ou par césarienne. Des spécialistes interviennent en soulignant que l’accouchement par voie basse présente des risques. Le réclamant reproche à la RTS de n’avoir pas indiqué le taux de mortalité concernant les accouchements par voie basse à l’hôpital de Delémont et de s’être contentée d’indiquer que le taux d’accouchement par césarienne est bas à l’hôpital de Delémont. Pour lui, le reportage manque ainsi de transparence, est lacunaire et arbitraire, donnant une image tronquée de la réalité aux téléspectateurs. Le processus a eu lieu par écrit. Le réclamant n’a pas été satisfait par les explications de la RTS, mais a expressément renoncé à poursuivre ses démarches auprès de l’AIEP.
2° Réclamations déposées et clôturées en 2019 (18)
RTS diverses émissions du 20 au 23 décembre 2018: le réclamant critique la couverture par la RTS du retrait des troupes américaines de Syrie. Pour lui, la RTS se contente de disserter longuement sur les conséquences supposées néfastes de ce retrait en manquant d’évoquer que la présence américaine en Syrie était illégale et que dès lors le retrait ne fait que suivre ce que demande le droit international.
Le processus a eu lieu par écrit. Le réclamant n’a pas été satisfait par les explications de la RTS mais a expressément renoncé à poursuivre ses démarches auprès de l’AIEP.
RTS 1, 19h30 du 4 janvier 2019 (Les gilets jaunes en France: L’arrestation d’Eric Douet, visage du mouvement, alimente la polémique): le réclamant revient sur le passage suivant: «Eric Douet, une figure controversée. Interpellé deux fois déjà. Il a notamment lancé un appel au putsch sur un plateau de télévision et il doit encore être jugé pour avoir porté une matraque artisanale, lors d’une manifestation.» Or, pour le réclamant, Eric Douet n’a jamais appelé au putsch.
Il a simplement expliqué vouloir investir l’Elysée, symbole du gouvernement, pour être écouté. De plus, Eric Douet a toujours insisté sur la non-violence et une démocratie directe, position qui va à l’encontre donc d’un coup de force armé, comme prétendu par la RTS.
Le processus a eu lieu par écrit. Le réclamant n’a pas été satisfait par les explications de la RTS mais a expressément renoncé à poursuivre ses démarches auprès de l’AIEP.
RTS 1, Infrarouge du 23 janvier 2019 (L’Europe envers et contre tous?): pour le réclamant, le plateau était déséquilibré avec 3 invités pro Union Européenne, sans compter la correspondante de la RTS à Bruxelles. Il n’y avait qu’une personne avec un avis opposé qui a en plus été interrompue à plusieurs reprises par le journaliste animateur qui a laissé la majorité du temps de parole aux pro Union Européenne, dont l’invité vedette M. Lévy. Le réclamant s’insurge contre le fait que la RTS déroule un tapis rouge à M. Lévy, qui pour lui est un imposteur intellectuel et à l’origine des pires conflits du 20-21 siècles dont l’Union Européenne a été partie prenante (Yougoslavie, Libye et Ukraine). Pour lui, c’est une atteinte à la démocratie et une violation de la LRTV, de la concession de la RTS et de la Charte des Nations Unies.
Le processus a d’abord eu lieu par écrit, puis une séance de médiation a eu lieu à Lausanne le 15 avril 2019. Le réclamant, même s’il n’était pas pleinement satisfait par les réponses apportées par la RTS, a estimé avoir pu procéder à un dialogue constructif et a renoncé à poursuivre ses démarches auprès de l’AIEP.
RTS La Première, La Matinale du 1er février 2019 («La chronique culturelle – La science-fiction pour sensibiliser au changement climatique» de Anne Laure Gannac): de manière générale, le réclamant s’insurge contre le déferlement sur la RTS d’informations totalement partisanes sur la cause climatique. Pour lui, la RTS fait campagne pour les Verts de façon éhontée en prenant fait et cause pour les adeptes du dérangement climatique et essaie de faire de chaque auditeur un manifestant du climat. Concernant l’émission en particulier, il pointe du doigt l’intervention d’Anne Laure Gannac qui veut amener les gens à se révolter contre le changement climatique alors que c’est une question avant tout scientifique. Le réclamant mentionne que selon les calculs du Prof Reinhart de l’EPFL, il est démontré que le CO2 ne peut pas agir comme gaz à effet de serre et qu’il faut donc chercher ailleurs les causes du réchauffement climatique.
Suite aux explications de la RTS, le réclamant a décidé de ne pas poursuivre le processus de médiation, tant les points de vue exprimés par la RTS étaient éloignés des siens. Il a donc retiré sa réclamation.
RTS 1, 19h30 du 6 février 2019 (René Nordmann: Ce n’est pas le moment de perdre les nerfs. Il faut entrer dans une logique de coopération): pour le réclamant, le présentateur n’a pas fait son travail en laissant son invité déformer la vérité sans le reprendre, laissant ainsi M. Nordmann affirmer que le référendum contre la loi sur les armes automatiques était lancé par l’UDC, ce qui n’est pas vrai et que ce parti ne s’est pas encore prononcé officiellement sur le sujet. Pour lui, lier le référendum à l’UDC est une manœuvre destinée à fausser l’opinion publique.
Le réclamant n’a pas été satisfait par les premières explications de la RTS mais n’a pas souhaité rencontrer les représentants de celle-ci.
RTS 1, Temps présent du 28 février 2019 (Esclaves sexuelles de l’Eglise): pour le réclamant, l’émission est 100% à charge contre l’Eglise avec une enquête unilatérale résultant en une entreprise de démolition totale. Il regrette le manque de contrepoids et de débat ainsi que les raccourcis et les amalgames utilisés, notamment par rapport à la séquence sur les avortements.
Le processus de médiation a eu lieu par écrit. Le réclamant n’a pas été satisfait et s’est réservé le droit de porter plainte à l’AIEP, ce qu’il n’a finalement pas fait.
RTS Info, «De jeunes Alémaniques se disputent le titre de ‘Bronx’ pour leurs communes» du 6 mars 2019: pour le réclamant, le titre de cet article viole l’art. 4 LRTV en induisant le public en erreur dans le sens où il donne faussement à croire que les violences relatées de Spreitenbach sont le fait de jeunes du pays, alors que ce n’est pas vrai.
Le processus de médiation a eu lieu par écrit. Le réclamant n’a pas été satisfait par les explications de la RTS et s’est réservé le droit de déposer plainte à l’AIEP. Le traitement de sa plainte par l’AIEP était toujours en cours à la fin 2019.
RTS 1, 19h30 du 15 mars 2019 «Carnage dans 2 mosquées à Christchurch en Nouvelle-Zélande: 49 morts et des dizaines de blessés»: le réclamant reproche au commentaire de Viviane Gabriel disant «49 personnes ont été tuées, parmi lesquelles des femmes et des enfants» d’être discriminatoire et susceptible d’attenter à la dignité des personnes de genre masculin. Pour lui, il faut s’interroger sur l’utilité de ces précisions et sur le message que ces dernières impliquent. Pour lui, la précision «dont des femmes et des enfants» remonte à des temps anciens et avait pour but, dans les conflits armés, de souligner le caractère criminel d’actes s’attaquant aux femmes et aux enfants qui ne portaient pas d’armes, tandis que les hommes étaient eux généralement armés et en mesure de se défendre.
Le processus de médiation a eu lieu par écrit. Le réclamant n’a pas été satisfait par les explications de la RTS et s’est réservé le droit de déposer plainte à l’AIEP, ce qu’il n’a finalement pas fait.
RTS Info, «Le cannabis fortement dosé augmente le taux de psychose dans la population» du 21 mars 2019: pour le réclamant, cette parution viole l’art. 4 LRTV en induisant le public en erreur à deux égards: d’une part, l’article ne précise pas que les sujets étudiés dans l’étude évoquée par la RTS étaient déjà sujets à des psychoses étrangères à la consommation de cannabis et, d’autre part, l’information que le principe actif du chanvre indien est le THC est fausse, car il s’agit de la résine, selon la Loi fédérale sur les stupéfiants et la science.
Le processus de médiation a eu lieu par écrit. Le réclamant n’a pas été satisfait par les explications de la RTS et s’est réservé le droit de déposer plainte à l’AIEP. Le traitement de sa plainte par l’AIEP était toujours en cours à la fin 2019.
RTS La Première, Médialogues du 6 avril 2019 (Comment les éditeurs se positionnent-ils face aux récentes attaques judiciaires dont font l’objet des journaux romands?): pour le réclamant, l’émission avait un parti pris inadmissible qui n’est pas compatible avec le service public. Pour lui, il s’agissait plutôt d’un monologue entre journalistes qui s’auto-congratulent, plutôt qu’un dialogue neutre et impartial. Par ailleurs, pour lui, la RTS n’a pas présenté l’ensemble de la situation et a dénigré M. Pascal Broulis.
Le processus a eu lieu par écrit. Le réclamant n’a pas été satisfait mais a renoncé à poursuivre ses démarches auprès de l’AIEP.
RTS La Première, La Matinale du 9 avril 2019 (La signature de Muriel Ballaman et intervention de Stéphane Deleury: «Les référendums à 50’000 signatures, c’est du passé» en lien avec le référendum proposé par l’Union démocratique fédérale (UDF) qui s’oppose à la révision de la norme pénale antiraciste qui sanctionne l’homophobie.): quatre réclamants se sont joints pour critiquer les propos tenus par Muriel Ballaman dans son intervention qui, selon eux, sont partiaux et simplistes en ce qu’ils concernent l’intention des référendaires. Pour eux, les intentions des référendaires sont honorables et utiles pour le débat politique et le progrès social, car ils permettent de garder la liberté d’opinion et d’expression sans que l’esprit critique soit taxé d’homophobie. Les réclamants ont également avancé que le fait de laisser entendre dans l’intervention de Stéphane Deleury que l’UDF était un parti insignifiant, en se référant à son score électoral, relevait d’un humour malvenu au regard de la réussite de son action référendaire et témoignait de la préférence de la Rédaction.
Le processus a eu lieu par écrit. Les réclamants n’ont pas été satisfaits mais ont renoncé à poursuivre leurs démarches auprès de l’AIEP.
RTS 1, Le 19h30 du 6 mai 2019 (interview de la sociologue Mallory Schneuwly Purdie sur le ramadan): le réclamant reproche à l’émission de donner une image de liberté de l’Islam par rapport à l’accomplissement des rites religieux, en cachant l’absence de liberté dans les pays musulmans. Il cite la presse suisse romande qui s’est fait l’écho de poursuites pénales encourues dans les pays musulmans par ceux qui observent mal le ramadan : par exemple, un étudiant condamné en Tunisie à 1 mois de prison pour avoir mangé pendant le ramadan et un jeune homme condamné à 5 ans de prison en Egypte pour les mêmes motifs.
Le processus a eu lieu par écrit. Suite aux explications de la RTS, le réclamant ne s’est plus manifesté.
RTS Info du 25 mai 2019 («Le groupe islamique est une émanation de la CIA»): le réclamant reproche à la RTS d’avoir laissé les propos tenus par son invité M. Corm sans les rectifier. M. Corm fait référence à Israël comme un pays d’apartheid, alors que, selon le réclamant, la réalité vécue dans ce pays est tout autre. Par ailleurs, le réclamant se plaint que la RTS est partiale et ne diffuse que des informations anti-israéliennes. Il demande également que la RTS ne parle plus de la Cisjordanie comme territoire palestinien occupé, mais comme territoire disputé.
Le processus a eu lieu par écrit. Le réclamant n’a pas été satisfait mais a renoncé à poursuivre ses démarches auprès de l’AIEP.
RTS 1, Temps présent du 16 mai 2019 (50 ans: Les Romands dans l’œil de Temps présent (5/5) De l’ombre à la lumière, le grand coming out des homosexuels): la réclamante a invoqué une violation de l’art. 4 LRTV sous l’angle du respect des droits fondamentaux (respect de la dignité humaine et non-discrimination). Pour elle, l’émission ne respecte pas le genre d’une personne mentionnée dans le reportage en la nommant par son prénom masculin d’avant et en s’y référant par le mot «frère» et le pronom «il», au lieu d’utiliser son nouveau prénom féminin et d’utiliser le mot «sœur» et le pronom «elle», ce qui est un non-respect de la transition de genre effectuée par cette personne. Par ailleurs, elle mentionne que le terme «transexuel.les» devrait être remplacé par le terme de «transgenres» qui est plus respectueux et pas limité aux organes.
Une séance de médiation a eu lieu à Genève le 2 septembre 2019. La réclamante a été satisfaite et a expressément renoncé à poursuivre ses démarches auprès de l’AIEP.
RTS 1, 19h30 du 10 juin 2019 (Les substances suspectes sur les aires de jeux): les réclamants invoquent tout d’abord une atteinte aux droits fondamentaux par le fait que la RTS a, contrairement à ce qu’elle aurait assuré lors du tournage, choisi de diffuser une séquence où la collaboratrice interviewée de l’Office Fédéral de la Santé Publique est mal à l’aise et ne sait pas répondre. D’autre part, les réclamants estiment que le reportage laisse ainsi une image biaisée au public car la thématique juridique sur laquelle la RTS met l’accent n’a pas d’incidence sur la santé des enfants.
Une séance de médiation a eu lieu à Genève le 28 novembre 2019. Les réclamants ont été satisfaits et ont expressément renoncé à poursuivre leurs démarches auprès de l’AIEP.
Programmes de la RTS dans le cadre des élections fédérales de la RTS: le réclamant a questionné la RTS sur ses pratiques par rapport à l’invitation des petits partis lors des émissions couvrant les élections fédérales. La RTS a fourni les directives de la SSR et les règles de la RTS édictées en matière d’accès aux programmes pour les élections fédérales, lesquelles sont communiquées aux partis et candidats. Selon les critères établis par la RTS pour participer aux émissions électorales, il faut soit avoir un siège au conseil national, soit que le parti ait obtenu 7 % aux dernières élections au Grand conseil. Les partis et candidats ne répondant pas à ces critères ne participent pas aux émissions électorales de la RTS, mais prennent part aux espaces de programme diffusés par la RTS à la radio, à la télévision et sur le web. Les critères de la RTS ont obtenu l’aval de l’AIEP.
Le réclamant ne s’est plus manifesté
RTS La Première, la Matinale du 17 septembre 2019 («Ici la Suisse – Mobilisation contre l’abattage d’arbres à Genève»): les réclamants reprochent tout d’abord au reportage de laisser croire aux auditeurs que les riverains interrogés l’ont tous été au Chantier des Allières au centre-ville de Genève alors que le journalise a changé de lieu pour questionner des passants à la Promenade Charles-Martin distante de plusieurs centaines de mètres des Allières et dont la problématique est différente puisqu’il n’y a pas d’abattage d’arbres prévu à cet endroit, la Promenade étant protégée par un plan de site. Par ailleurs, le reportage omet de mentionner certains éléments déterminants comme le fait que les arbres abattus ou à abattre se trouvent sur des parcelles privées et non dans des espaces publics (parcs et jardins) et que les arbres abattus seront replantés. Les réclamants s’étonnent que la parole n’ait pas été donnée au Conseil d’Etat, au Département concerné, à M. Antonio Hodgers ou encore à la Ville de Genève.
Pour les réclamants, le reportage donne ainsi une fausse impression au public et ne lui donne pas tous les éléments lui permettant de se faire librement son opinion.
Une séance de médiation a eu lieu à Genève le 29 novembre 2019. Les réclamants ont été satisfaits et ont expressément renoncé à poursuivre leurs démarches auprès de l’AIEP.
RTS Info, La cigarette électronique fait toujours plus de morts aux USA du 7 octobre 2019: pour le réclamant, cette parution comporte une erreur. L’information que le principe actif du chanvre indien est le THC est fausse, car il s’agit de la résine, selon la Loi fédérale sur les stupéfiants et la vérité scientifique de la pharmacologie. Le réclamant attend de la RTS qu’elle ne répète pas une erreur de fait, quand bien même tout le monde la commet. Le réclamant avait déjà rendu attentif la RTS à cette erreur à l’occasion d’une autre réclamation (cf. ci-dessus).
Le processus a eu lieu par écrit. Le réclamant n’a pas été satisfait et s’est réservé le droit de saisir l’AIEP, ce qu’il n’a finalement pas fait.
3° Réclamations déposées en 2019 et toujours en cours de traitement (3)
RTS 1, 19h30 du 5 septembre 2019 («L’Etat du Michigan aux Etats-Unis va interdire à la vente les recharges aromatisées pour cigarettes électroniques» et interview de Jean-Paul Humair intitulée «Jean-Paul Humair, médecin HUG: «On a des connaissances fragmentaires sur cette épidémie»): pour le réclamant, la RTS a trafiqué une interview originellement faite par CBS pour en modifier le sens et présenter une information biaisée au public sur le vapotage. Pour lui, la RTS affirme que la maladie pulmonaire du jeune homme filmé provient de sa consommation de vapotage de la marque Juul depuis un an, mais passe sous silence le fait que la victime vapote depuis deux ans sans problèmes et que surtout elle a reconnu devant les caméras de CBS avoir aussi consommé des liquides frelatés et illicites au THC provenant du marché noir les mois qui ont précédé sa crise de détresse respiratoire. Pour le réclamant, le sujet de la chaîne américaine montre clairement que le problème est très probablement lié à un additif utilisé par les dealers pour tromper leurs clients sur la qualité de leur marchandise. La RTS a utilisé les mêmes images et éléments de l’interview, mais en coupant tous les passages concernant les produits illégaux. Pour le réclamant, la RTS induit ainsi le public en erreur.
Le processus était toujours en cours à la fin 2019.
RTS 1, 19h30 du 23 septembre 2019 (reportage de Valérie Gillioz: Les services de renseignements suisses -SRC- auraient surveillé une Conseillère nationale -Mme Kiener Nellen-. La révélation rappelle le scandale des fiches; suivi de l’interview de l’ancien conseiller national socialiste Andreas Gross): le réclamant figure parmi les personnes qui ont été interrogées par Valérie Gillioz, mais dont l’intervention n’a pas été gardée pour le reportage. Le point de vue du réclamant était que le SRC n’avait pas violé la loi et qu’il gardait toute sa confiance. Pour lui, le sujet où n’apparaissent au final que les interviews de Mme Margret Kiener Nellen et de M. Carlo Sommaruga, tous deux conseillers nationaux PS, et qui est suivi d’une longue interview de l’ancien conseiller national socialiste Andreas Gross, ne donne la parole qu’à des personnes étant très critiques avec le SRC. Par ailleurs, le reportage laisse entendre que tous les élus fédéraux sont du même avis alors que tel n’est pas le cas. Pour le réclamant, le reportage est ainsi tendancieux, déséquilibré et ne laisse pas le public se faire sa propre opinion.
Une séance de médiation a eu lieu à Genève le 28 novembre 2019 et les discussions étaient toujours en cours à la fin 2019.
RTS La Première, La Matinale des 18 et 20 novembre 2019 (signature de Thibaud Schaller «En Suisse, le pouvoir se partage» et de Vincent Bourquin «Regula Rytz doit prendre ses responsabilités»): pour le réclamant, les rédacteurs de l’émission ont laissé transparaître un contentement évident après le succès des partis verts aux élections fédérales, et ce en ligne avec leur penchant politique qui transparaît du rabâchage médiatique et du climat anxiogène entretenu par la RTS au sujet du climat avant les dites élections. Pour lui, le seul but de la RTS est de promouvoir la nomination d’un conseiller fédéral vert quitte à se livrer à une démolition en règle des partis et élus en place, en particulier du Conseiller fédéral Ignazio Cassis, et ce sans apporter la moindre preuve d’affirmations dévalorisantes faites à l’emporte-pièce.
Le réclamant se demande comment la RTS peut ainsi prétendre contribuer à la libre formation de l’opinion publique et refléter équitablement la diversité de celle-ci. Pour lui, la RTS devrait mieux contrôler, corriger ou au besoin sanctionner de tels comportements de la part de ses rédacteurs ou alors veiller à un meilleur équilibre des tendances au sein des responsables des rédactions.
Conclusion
Cette année encore, les processus de médiation ont surtout eu lieu par écrit. Une séance de médiation a été organisée dans seulement 25 % des cas environ.
Cela étant, pour faire écho à la citation de Walter Lippmann, dans toutes les rencontres de médiation qui ont eu lieu, la confrontation des points de vue a été enrichissante pour les deux parties.
Il convient de relever l’investissement et la responsabilisation des personnes qui ont pris part au dialogue en osant chacune exposer son contexte, expliquer ses attentes, exprimer son ressenti et expliciter son point de vue.
Cette subjectivité prend tout son sens en médiation et la réalité vécue par chacun ne peut évoluer qu’en se dévoilant et en se mesurant à celle de l’autre.
Cet exercice est malheureusement plus stérile lors de processus écrits dont les échanges restent circonstanciés, voire figés à des aspects plus concrets.
Or, pour reprendre l’idée exprimée dans la citation de Marcel Proust, présenter des éléments factuels ne parvient pas facilement à passer la frontière des opinions.
Raymonde Richter
Médiatrice RTSR