09.04.2025 - Médiatic

Organe de médiation: des ponts entre la RTS et son public

Raymonde Richter, médiatrice de la SSR Suisse Romande (© D.R.)

Comment la médiation permet-elle de désamorcer les conflits entre la RTS et son public ?

Avocate de formation et experte en médiation, Raymonde Richter dirige depuis plus de dix ans l’organe de médiation de la SSR Suisse Romande (SSR.SR). À travers des échanges ouverts, elle facilite la compréhension mutuelle, tout en contribuant à l’amélioration continue des pratiques journalistiques.

Pouvez-vous nous présenter votre parcours et ce qui vous a amenée à exercer la fonction de médiatrice ?
Je suis avocate de métier, et j’ai exercé au barreau et en entreprise avant de me former à la médiation et d’en faire mon activité principale comme indépendante. La médiation permet d’aborder les problèmes à leur racine et de trouver des solutions globales et durables. C’est une rencontre qui responsabilise les protagonistes et permet un dialogue constructif sur les aspects humains et techniques. Afin d’accompagner au mieux les personnes pour sortir apaisées et grandies de leur désaccord, je me suis formée au coaching. Je suis à la tête de l’organe de médiation de la SSR.SR depuis une dizaine d’années, mandat qui représente 10 % de mon activité. J’ai une suppléante qui intervient en cas d’absence ou de conflit d’intérêt.

Quel est le rôle précis de l’organe de médiation de la SSR.SR ?
En tant qu’entité externe, indépendante et neutre, notre mission est de former un pont entre la RTS et son public en cas de mécontentement, et de réduire le nombre de plaintes subséquentes à l’Autorité indépendante d’examen des plaintes (AIEP). Au cours des dernières années, seules 10 % des réclamations sont suivies d’une plainte. Nous traitons les doléances en lien avec les articles 4 et 5 de la Loi sur la radio et la télévision (LRTV). Les critiques les plus fréquentes invoquent des erreurs factuelles et un manque d’impartialité. Le public a à cœur de pouvoir se forger librement une opinion sur les informations diffusées. Nous facilitons le dialogue entre les réclamants et les responsables de la RTS en veillant à prendre en considération les deux côtés, afin de faire émerger une compréhension mutuelle, voire un accordage.

Qui sont les personnes qui déposent des réclamations ?
Il n’y a pas un profil type de réclamant. Ils ou elles sont majoritairement établies en Suisse romande, bien qu’il y ait déjà eu des réclamants établis en Suisse alémanique ou à l’étranger. Avec l’évolution des médias numériques, les jeunes se manifestent de plus en plus. Parfois, ce sont des personnalités publiques, des politiciens ou des experts d’un domaine précis. Certaines personnes sont représentées par un avocat. Les réclamants expliquent souvent apprécier la RTS, mais avoir été déçus, ce qui les a motivés à se manifester.

Comment se déroule concrètement un processus de médiation ? 
Dès réception d’une réclamation, j’analyse sa recevabilité. J’ai en principe un entretien téléphonique avec le ou la réclamante pour expliquer la façon de mener le processus et clarifier les attentes. Si la réclamation entre dans mon champ de compétence, je contacte ensuite la RTS qui décide de poursuivre les échanges par écrit ou par une séance de médiation. Dans le deuxième cas, la rencontre a lieu dans un cadre neutre, en général dans le salon d’un hôtel. L’objectif est de créer un environnement propice au dialogue où la RTS et le ou la réclamante sont mis sur un pied d’égalité. Certaines personnes repartent avec une meilleure compréhension du travail journalistique, tandis que la RTS peut identifier des points d’amélioration.

Certaines réclamations aboutissent-elles à des changements concrets ?
Oui, la RTS peut reconnaître un manquement, s’excuser, et prendre des mesures telles qu’une correction, une précision, ou encore le retrait de l’émission du site internet et des archives. En vertu de sa liberté éditoriale et rédactionnelle, la RTS ne prend jamais l’engagement de faire une émission dans le sens voulu par le ou la réclamante.

Quelles sont les limites de votre intervention ?
Nous n’avons pas de pouvoir de décision ni de sanction. Nous officions avant tout comme tiers facilitateur du dialogue. Si un ou une réclamante n’est pas satisfaite de l’issue de la médiation, il ou elle peut déposer une plainte devant l’AIEP en matière de radio-télévision, qui se prononce sur les violations de la LRTV invoquées.

Qu’appréciez-vous le plus dans votre travail ?
J’apprécie particulièrement de rencontrer des personnes d’horizons variés et assurer un lien privilégié entre le public et les représentants de la RTS. Aussi, accompagner les échanges et permettre une compréhension mutuelle, voire des solutions concrètes, est particulièrement satisfaisant. Je trouve également du sens quand l’issue de la médiation amène une réflexion et une évolution des pratiques au sein de la RTS.

Par Manon Céleste Mariller

Paru dans le magazine Médiatic 230 (mars 2025)