04.10.2021 - Télévision

Pierre Nebel: «J’aime faire aimer la politique»

Pierre Nebel ©RTS/Laurent BLeuze

Voilà 11 ans que Pierre Nebel couvre l’actualité politique suisse pour la télévision.

Empathique, malicieux, le journaliste sait rendre digeste la matière complexe qui bout dans la marmite fédérale. Rencontre, en marge du reportage consacré aux correspondants parlementaires pour le Médiatic

Pierre Nebel, 47 ans, a vécu deux ans à Taïwan, a travaillé un an dans l’industrie horlogère, avant de devenir journaliste, pour la presse écrite (feu L’Hebdo) d’abord, puis comme correspondant à Zurich pour la RTS, avant d’arriver dans la Berne fédérale.

On sent chez vous un énorme enthousiasme pour ce job de correspondant parlementaire?

J’aime être à Berne. C’est une matière qui est éminemment complexe et même après 11 ans, je continue à être surpris par des décisions du Parlement, par des processus que j’ignorais et en même temps, il y a l’avantage d’avoir de l’expérience. Ce qui donne une certaine profondeur à l’analyse. Par exemple, j’étais là quand Alain Berset a été élu au Conseil fédéral et je vois son évolution. J’ai encore en tête l’opposition entre lui et Pierre-Yves Maillard à l’époque et je peux la sentir encore dans certains dossiers.

A quelqu’un qui ignore tout du fonctionnement de notre pays, comment résumeriez-vous votre rôle de journaliste parlementaire?

En Suisse, nous avons régulièrement des votations populaires qui obligent les citoyens à prendre position sur des sujets. Cela signifie que le degré d’information de la population, sur les affaires publiques, doit être important. Notre job est de faire comprendre, parfois jusque dans les détails, les lois, l’histoire de leur création, des compromis qui mènent à ce que telle loi soit approuvée par le Parlement, fasse l’objet, ou non, d’un référendum. Parfois de manière très basique et dans un contexte peu spectaculaire, il faut expliquer que derrière la porte de cette commission-là, une décision très importante a été prise, comme l’âge de la retraite des femmes à 65 ans. Mais va-t-il être augmenté en 6 ou 9 ans, les mesures compensatoires seront-elles de 750 millions ou de 400 millions de francs? C’est d’une complexité énorme et notre rôle est de réduire cela à un sujet compréhensible en une minute 30, au téléspectateur ou à la téléspectatrice fatigué·e de sa journée, qui digère son repas. Le tout dans un contexte visuel intéressant, alors que ce sont toujours les mêmes images, les mêmes interlocuteurs. C’est un défi permanent.

Lors des élections fédérales en 2019, vous aviez réalisé de très remarqués Carnet de campagne ou régulièrement vous proposez Carnet de session ou encore Carnet politique. Qu’aimez-vous dans cet exercice où vous excellez ?

C’est vraiment du reportage télé, avec un caméraman, un preneur de son. J’ai repris le concept développé par Alain Rebetez en y mettant ma patte. En situation d’interview, les interlocuteurs sont un peu figés. Là, dans Carnet, on suit l’action sur la longueur et les gens finissent par oublier la caméra et sont plus naturels. On montre le réel et de ce réel surgissent des moments magiques. La politique s’exprime sans masque, ça permet de raconter des histoires autrement. A travers ces carnets, je fais autre chose que rendre compréhensible, au jour le jour, l’action complexe du gouvernement et la suivre d’un œil critique. Je suis un autre axe qui me tient à cœur: rendre humain ces femmes et hommes politiques, rétablir un lien de confiance en les montrant tels qu’elles ou ils sont, glorieux ou minables, tendres ou arrogants, c’est selon. Si j’arrive à faire aimer la politique, à montrer qu’il y a de la noblesse dans l’engagement de ces politiciens et politiciennes pour ce qu’ils, qu’elles considèrent être bon pour la collectivité, c’est tant mieux.

Propos recueillis par Marie-Françoise Macchi