17.08.2021 - Médiatic

Portrait-métier: scripte en télévision

Natacha Morel en régie, conducteur sous les yeux et chronomètre en main ©RTS/Philippe Christin

Les scriptes assistent les réalisateur·trices à la préparation et la réalisation des émissions de télévision.

«On y va dans 5-4-3-2-1 top!» C’est par ce décompte que démarrent vos émissions préférées. Il émane de la régie, parfois de la bouche de Natacha Morel, qui veille depuis 2013, en tant que scripte, à la bonne marche des émissions de la RTS. Elle lève pour nous le voile, avec une passion communicative, sur ce métier méconnu.

Quel est le rôle des scriptes?

Nous sommes garant·es de la bonne continuité des émissions. En amont, les réalisateur·trices nous font part de la façon dont ils veulent que l’émission se déroule, les différents plans, les mouvements de caméras, l’éclairage… Tout ça, on le note dans un conducteur qui est un peu l’équivalent, à la télévision, d’un scénario de cinéma. Avant l’émission, on sait donc seconde par seconde ce qu’il va se passer, tout nous reste en tête.

Et pendant l’émission?

Nous officions depuis la régie, avec un micro casque sur la tête et un chronomètre en main. Nous suivons le script, donnons les instructions aux personnes qui s’occupent des images, du son, de la lumière, etc. Elles entendent constamment notre voix et celle du réalisateur ou de la réalisatrice. On peut également parler à l’oreillette des présentateur·trices si besoin. Souvent pour des raisons de timing, en disant par exemple «il reste 3 minutes, 2 minutes, 1 minutes, conclu, vraiment conclu!» (rires). J’aime bien dire qu’on est des chef·fes d’orchestre parce qu’on fait jouer une partition qu’on n’a pas écrite nous-mêmes. Ceux qui l’ont écrite, c’est le réalisateur, le chef photo, etc. Nous, on compile le tout et on le restitue au fur et à mesure de l’émission.

Vous devez donc tout chronométrer…

Oui et ça déteint un peu sur ma vie! Je ne suis jamais une seconde en retard, je peux dire exactement le temps qu’il faut pour aller d’un endroit à l’autre. J’ai un chrono qui tourne en permanence dans la tête.

Comment se passe la collaboration avec les réalisateurs et réalisatrices?

On travaille vraiment main dans la main. Tellement que je me suis mis en couple avec un réalisateur avec lequel nous avons un fils ! De manière générale, il faut beaucoup s’adapter car ils ou elles ont des attentes différentes. Cela requiert pas mal de tact et un peu de psychologie. Même si les réalisateur·trices prennent la décision finale, notre avis compte aussi.

Comment préparez-vous un téléjournal ou Infrarouge par exemple?

Le TJ est un cas particulier car c’est très codé. Dès la première séance de rédaction en début de matinée et jusqu’au soir on prend note de toutes les propositions qui se font, les sujets qui seront diffusés. On regarde leurs durées et on vérifie aussi qu’il n’y ait pas de problèmes techniques, d’erreurs au montage. Pour Infrarouge, comme c’est un débat, on ne peut pas écrire et prévoir beaucoup de choses à l’avance. Pour nous, ce sont des émissions plus calmes puisqu’on ne peut presque rien annoncer en régie. Le plus difficile pour une émission comme celle-là est de respecter le minutage.

Qu’est-ce qui vous plaît particulièrement dans ce métier?

Ce qui est extrêmement stimulant est qu’on passe d’une émission à une autre, de Faut pas croire, au téléjournal en passant par Infrarouge ou ABE. J’aime aussi beaucoup l’adrénaline du direct, quand il y a un imprévu et qu’il faut rapidement trouver une solution. Cela demande pas mal de sang-froid!

Un exemple?

Il y a un couac dont je me souviens bien parce qu’il a eu lieu un 1er avril et que tout le monde a cru à une blague! Juste avant le lancement d’un téléjournal, tous les murs derrière le présentateur sont devenus noirs. Heureusement, il existe un arrière-plan de secours. On l’a retrouvé au dernier moment et on a lancé l’émission avec quelques secondes de retard. Par contre, on a dû rester sur une caméra, avec des zooms et des dézooms pour simuler différents plans. Les téléspectateurs·trices n’y ont peut-être rien vu.

J’imagine que vous appréciez aussi quand tout se passe bien…

Bien sûr! C’est comme une partie de tennis parfaite durant laquelle on enchaîne les coups de manière fluide. Il y a une belle solidarité dans l’équipe. On vit tous la même chose, en même temps, on est investi et on a envie que l’émission soit un succès. Pour rien au monde je ne changerais de métier.

Texte: par Vladimir Farine, paru dans le magazine médiatic 217 (Juillet 2021/Août 2021)